Révisé par Lori Bernstein, membre de l’équipe principale, neuropsychologue
Nombreux sont les patients qui déclarent souffrir de difficultés cognitives pendant et après un traitement contre le cancer. Ces difficultés peuvent dépendre du type et de l’emplacement du cancer, du type et de la durée du traitement, de la présence d’autres maladies et affections médicales, ainsi que de problèmes de santé mentale comme la dépression, l’anxiété et le stress.
Il arrive que des personnes traitées pour un cancer constatent un changement dans leurs capacités cognitives, notamment leur concentration et leur aptitude à mener plusieurs tâches de front. Elles pourront aussi avoir plus de mal à apprendre ou à se rappeler des choses, et peineront à trouver les mots à l’oral comme à l’écrit. Si, en général, le rétablissement survient graduellement une fois le traitement terminé, il varie beaucoup d’une personne à l’autre. Certains symptômes sont insignifiants, tandis que d’autres sont nettement plus gênants. Les symptômes sont plus souvent persistants chez les personnes ayant suivi une chimiothérapie. Les termes « cerveau chimio » et « brouillard de la chimio » sont donc largement employés, même lorsqu’il n’y a pas eu de chimiothérapie. Les causes des difficultés cognitives restent floues, mais on pense que les facteurs en sont nombreux. Le problème est encore plus prononcé dans les milieux stressants.
Les difficultés cognitives persistantes se manifestent également en cas de tumeur cérébrale. À chaque région du cerveau correspondent des fonctions précises. Par conséquent, l’emplacement et la taille de la tumeur détermineront le type de défaillance. Parallèlement, les traitements associés, la physiologie propre à chacun et la nature des médicaments sont eux aussi susceptibles de compromettre le fonctionnement cognitif.
Conséquences sur le travail
Les patients devront estimer leur durée maximale de concentration sur chaque activité pour savoir s’ils ont besoin d’aide ou de formation. À certains moments de la journée, leur vivacité pourrait faiblir. En ayant conscience de ces schémas, ils seront à même de recenser les tâches et les heures pour lesquelles il leur faudra des stratégies visant à augmenter leur rendement.
Pour en savoir plus, les patients auront avantage (même s’il ne s’agit pas d’enfants) à consulter Pathways to Success for Youth Facing Neurocognitive Challenges (PDF, pages 9 à 12, Pediatric Oncology Group of Ontario).
Voici les problèmes que les patients pourraient éprouver au travail1 :
- Avoir du mal à répondre rapidement aux questions.
- Passer d’une tâche à l’autre.
- Devoir suivre les instructions pas à pas lorsqu’il y en a plus d’une.
- Oublier les détails d’une conversation ou d’une réunion.
- Peiner à organiser une tâche ou à regrouper tous les éléments pour l’exécuter.
- Perdre le fil lors d’une conversation.
- Oublier certains mots ou noms (les avoir « sur le bout de la langue »).
- Ne pas réussir à suivre le fil des évènements.
Les solutions accessibles au patient
Il existe des stratégies pouvant être adoptées par l’employeur comme par le patient pour gérer les difficultés cognitives et en limiter les effets au travail.
Par exemple, pour surmonter l’épuisement mental, le patient peut prendre plus de pauses. Parallèlement, il pourra prendre conscience de son degré de stress et organiser son travail de manière à réduire la détresse. La détresse peut aggraver la perte de capacité de réflexion et donc, nuire au rendement. Certains aspects du milieu de travail augmentent inutilement le degré de stress, par exemple, l’excès de discussions ou de bruit. S’il est impossible d’en supprimer la source, les exercices de relaxation et la respiration lente et profonde sont efficaces.
Lorsque le patient se sent débordé, il lui sera utile de dresser une courte liste de tâches organisées en fonction de ses priorités ou de ses contraintes. Il pourra alors se concentrer uniquement sur la première, sans penser à quoi que ce soit d’autre. S’il pense à toutes les tâches de la liste, il risque d’en perdre le fil ou de se stresser, et de perdre sa concentration. Il se peut que, par le passé, votre patient ait été capable d’exécuter plusieurs tâches de front, mais cette capacité est mentalement très exigeante et risque d’aggraver son sentiment d’accablement.
Pensez à orienter le patient vers une évaluation cognitive avant la reprise du travail. Cette procédure l’aidera à faire le point et à trouver des stratégies pour composer avec ses difficultés cognitives.
Pour en savoir plus sur le brouillard de la chimio, visionnez la vidéo de présentation de Lori Bernstein : Brain fog: What is it & What can you Do About It? (Princess Margaret Hospital, UHN)
Voici d’autres ressources sur le brouillard de la chimio et les problèmes associés aux tumeurs cérébrales, ainsi que sur les difficultés cognitives :
- Ask the Expert: Brain Tumours and Cognition, La fondation canadienne des tumeurs cérébrales
- Ask the Expert: Communication and Cognition, La fondation canadienne des tumeurs cérébrales
- Side Effects and Their Management: Memory and Cognitive Changes, American Brain Tumor Association
- Returning To Work After a Brain Tumor Diagnosis, American Brain Tumor Association
- Video on Returning to Work for Brain Tumour Patients, BC Cancer Agency
Mesures d’adaptation du lieu de travail
La modification des tâches :
- Demander au patient d’indiquer les tâches qu’il trouve les plus difficiles.
- Lui suggérer de voir avec son superviseur s’il est possible de les simplifier, de les partager avec un collègue ou de lui accorder plus de temps pour les exécuter.
- Demander à ce que les consignes soient données par écrit plutôt qu’à l’oral.
- Répéter avant de faire une présentation.
- Acquérir des aptitudes en gestion du temps et en organisation, ou les renforcer.
- Éviter de mener plusieurs tâches de front.
- Créer des listes de tâches classées par priorité et les consulter régulièrement dans la journée.
- Configurer des alertes sur le calendrier électronique.
- Poser ses clés, ses dossiers, son manteau et ses autres objets tous les jours à la même place.
- Économiser son énergie. Anticiper ses hausses et ses baisses d’énergie et s’adapter.
Stratégies personnelles :
- Pratiquer des techniques de gestion du stress.
- Prendre plus de pauses au cours de la journée de travail.
- Apprendre à s’accepter : ne pas faire preuve d’intransigeance envers soi-même s’il est impossible de se souvenir de quelque chose sans rappel.
La modification du milieu de travail :
- Si le patient est d’accord pour révéler la situation à ses collègues et à son superviseur, leur expliquer en quoi consiste ses difficultés cognitives.
- Demandez à des collègues fiables de faire ou d’envoyer des rappels.
- Demander une période quotidienne au cours de laquelle le patient ne devra pas être dérangé afin qu’il puisse effectuer les tâches les plus difficiles.
- Si possible, créer un environnement calme ou fournir un casque suppresseur de bruit ou des bouchons d’oreille.
- Débarrasser le lieu de travail.
- Placer le poste de travail face à un mur plutôt qu’à un couloir passant pour réduire les distractions visuelles.
- Optimiser l’éclairage du poste de travail (ni trop sombre ni trop lumineux).
Visionnez la vidéo de la BC Cancer Agency Returning to Work for Brain Tumour Patients.
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